lundi 30 novembre 2009
MESSAGE DE GREGORY SAINT GENIES - SALT LAKE CITY
8 au 14 novembre : Salt Lake City les retrouvailles : première coupe du monde.
De retour à Salt Lake city, je me sens comme à la maison. J’y ai beaucoup d’amis et j’adore la piste.
Lundi, ce sont les premiers entraînements officiels à 9 h du matin et je suis deuxième à partir. Je dois aller chercher le matériel qui arrive avec tous les autres, de Whistler en camion.
Levé, 5 h 30 du matin, je prends la voiture pour la piste et là surprise : pas de camion. Il y aura du retard. L’entraînement est repoussé à 11h.
A 10h et des poussières, j’ai enfin mon matériel. Il faut le déballer et le préparer. Ça va être juste mais pas de problème, j’ai mes lignes en tête.
Aujourd’hui la glace est à moins 10°C, la vigilance est de mise. A la fin de la première journée, satisfaction, je suis dans les meilleurs de mon groupe qui rassemble des pointures : les allemands, les laitons et les suisses entre autre.
On rentre à l’hôtel. Un bon déjeuner, mais rapide, la journée n’est pas terminée. J’ai programmé une séance de musculation puis l’habituel travail sur le matériel. Des réglages s’imposent et les patins choisis pour le lendemain doivent être préparés pour les descentes. C’est le même rituel tous les jours.
Deuxième jour d’entraînements officiels, la température de la glace oscille entre moins 5 et moins 7°C. C’est mon terrain de jeu favori. Après les deux manches, ça se confirme. Une fois 5ème et une fois 2ème de mon groupe. Les sensations étaient bonnes et les manches particulièrement fluides. Allez une bonne séance de vitesse et repos. Ca aura été une bonne journée.
3ème jour d’entraînements officiels, j’ai fais mon choix sur les réglages et les patins. Pas trop d’expérimentation aujourd’hui, le but est de faire deux manches d’affutage et de confort. La glace est aux alentours des moins 1,5 et la température extérieure relativement élevée. Je sais ce que ça veux dire : « glace tendre et possibilité de givre, il va falloir être très doux dans le pilotage ». Ca ne rate pas. Le classement est moins bon. Je fais 18ème et 12ème. Pas d’affolement pour autant, je sais que mes patins n’étaient pas adaptés pour la « glace chaude ». On garde la même stratégie, il faut que je sois plus vigilant demain pour la course et je suis sure que ça va payer.
Ca y est c’est le grand jour. Je dois avouer qu’il émerge en moi un sentiment particulier. Après la blessure, la chirurgie, la rééducation, repartir au plus bas du classement mondiale et les nombreuses batailles que j’ai du affronter, me revoilà parmi l’élite. En seulement une saison, certes chargée, j’ai réussi à récupérer mon sésame pour représenter mon pays au plus au niveau de compétition. Et, ironie du sort, deux ans après toute cette souffrance, c’est sur cette même piste et pour une même épreuve d’ouverture de saison. Alors, c’est vrai, je suis un peu tendu. Je me demande si le destin ne va pas me jouer un mauvais tour. Mais, voici le moment, l’échauffement est terminé. Je me présente au départ et tous mes doutes sont derrières moi. Je fais face à la piste de poussée et au virage un. Je suis déjà dans ma course et je ne pense qu’au plaisir que j’éprouve quand je suis là bas. Une pensée pour ceux qui stressent pour moi. Je suis seul avec la piste, plus rien d’autre ne compte autour de moi à cet instant.
La poussée se passe bien. Je suis encore en un seul morceau. C’est bon signe. Une petite correction avant le V1 mais rien de grave. V1, V2, V3, tout est fluide. L’entrée dans V4 est bonne. Je sens l’accélération. Je suis un peu « milieu » dans le V6 mais mon pilotage est en phase. Le labyrinthe passe à toute allure et me voilà déjà dans le V11. Le timing est bon et les 2 vagues du V12 sont derrière moi. V13 et V14, la grande ligne droite et la montée dans le virage 15, c’est l’arrivée.
13ème après la première manche, je suis satisfait.
Je me suis éclaté et déjà je rentre dans le top 15.
Ce n’est pas terminé pour autant. Il reste encore la deuxième manche. Juste le temps de remonter au départ et après que le dernier d’entre nous soit revenu, le « parc fermé » ouvre. 10 petites minutes pour régler le matériel.
La deuxième manche commence. Je suis confiant. Les 20 meilleurs seulement ont mérité le droit de glisser encore une fois sur cette piste pour se mesurer les uns aux autres. La course est très serrée. Je suis 13ème ex aequo avec un américain et seulement 3,5 dixièmes entre nous et le top 5.
La deuxième manche commence. Le départ se fait dans l’ordre inverse du classement de la première manche. Je suis 8ème à partir. Mon tour arrive très vite. Je suis décontracté et serein, de nouveau sur le planche de départ. Le chrono des 30 secondes se déclenche.
Je pose mon Skeleton sur la glace et après un petit rituel de départ, je m’élance. La poussée est bonne. Le haut de la piste est plaisant, V1, V2, V3 et V4 me permettent d’accumuler une bonne vitesse. Je m’approche du V6 un peu trop à droite. Je dois piloter plus fort qu’à l’accoutumé pour rétablir la situation. Je garde le contrôle dans le labyrinthe. Une petite friction sur l’épaule droite avant l’entrée du virage 11. Les profiles de la piste se suivent avec fluidité. Déjà, je parcours le V14. Dans la ligne droite qui suit je fais un petit détour sur la droite mais pas de contact avec le muret. Le V15 est derrière moi et je passe la ligne d’arrivée. Je me stoppe à l’aide des tapis de mousse dans la décélération.
En moi j’espère que cela suffira pour maintenir mon rang. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Je rétrograde légèrement. Je finis 18ème de la course.
Bienvenu en coupe du monde. Ici pas le droit à l’erreur, même la plus infime. Il faut être parfait de bout en bout et sur deux manches.
C’est une bonne leçon pour la suite. Chaque course est un pas de plus sur le chemin de la performance vers Vancouver. A la remise des prix, nous savourons tous ensemble les exploits du jour. C’est l’âme de ce sport. La petite famille du skeleton célèbre ses vainqueurs et admire tous les participants pour leur talent et leur courage.
La journée n’est pas terminée pour autant. Avant un repos bien mérité, il faut préparer et emballer le matériel pour le départ vers la prochaine compétition. Lake Placid est notre destination à venir. Les skeletons partiront en camion dans les prochaines heures et nous suivrons en avion.
Grégory SAINT GENIES - Skeleton
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